Mon Seigneur, j’ay chanté dessus les bordz de Seine,
En vostre honneur, le loz, le plaisir et la peine
De l’amour d’Orithye et du vent Aquilon,
Estant pour avant-jeu de plus haute chanson.
Doncques prenez ceste Hymne, ainsi comme j’estime
Vous donner de bon cœur le sçavoir de ma rime :
Mais (làs) l’on vous dira que trop audacieux
J’ay esté, en offrant ces vers devant voz yeux,
En connoissant combien vostre grande hautesse
En grandeur, peut passer mon humble petitesse.
Mais je vous respons bien que je ne l’ay pas fait,
Sinon pour m’aquiter de l’honneur et bien fait
Que certe il vous a pleu, par vostre grace, espandre,
Sans l’avoir merité, envers ma muse tendre.
C’est aussy qu’Eraton m’accuse de bien loing,
Ne voulant que je prene en moy quelqu’autre soing
Que de vous eslargir les fruitz qu’elle me donne,
Antéz dessus ceux là qu’ell’ porte en sa couronne.
Puisque donc il luy plaist de bon cœur me prester
Son luth, en vostre honneur, pour de l’amour chanter
Devant vostre grandeur, il faut que je desdie
Le fruit de mon labeur, puisqu’il ne tient sa vie
Et gloire que de vous, si quelque gloire il ha,
Car certes ce feut vous qui, premier, excita
Ma barque, qu’il n’avoit encor enflé son voile,
Pour courir et voguer, desoubz l’heureuse estoille
Qui luit sus vostre front, qu’est l’appuy de mon fort.
Ainsi je suis venu devers vous, comme au port
Du Phare qu’il me guide apendant pour trophée -
C’est Hymne d’Orithye et du froit Vent Borée.
Et c’est un vestement que j’ay cy despouillé,
Lequel est fraischement, et batu, et mouillé
Des cruelz flotz d’amour, pour donner tesmoignage,
(Apres m’estre sauvé) quel a esté l’orage.